1502

De Michael Ennis. Le Cherche-Midi, 2013. Roman historique policier. Excellente lecture. [569 p.]
Titre original : The Malice of Fortune, 2012
1502Résumé : « Les Borgia règnent sur l’Italie. Le pape Alexandre VI, de son vrai nom Rodrigo Borgia, apprend que l’on vient de retrouver un indice qui permettrait peut-être d’expliquer, cinq ans après les faits, le meurtre mystérieux de son fils ainé, Juan. Une amulette dont celui-ci ne se séparait jamais est en effet réapparue près du corps d’une inconnue assassinée à Imola, siège de la cour de son autre fils, le Prince César Borgia. Il charge alors Damiata, l’ex compagne de Juan, d’élucider ce mystère. À Imola, Damiata apprend que le cadavre de l’inconnue, atrocement mutilé, a été confié à l’ingénieur général auprès de César Borgia, un certain Léonard de Vinci, passionné d’anatomie et précurseur de la médecine légale. Alors qu’elle vient de faire la connaissance d’un diplomate florentin, Nicholas Machiavel, en mission secrète auprès du Prince, une seconde femme est retrouvée assassinée dans des conditions tout aussi atroces. Damiata, aidée de Leonard de Vinci, l’éminent scientifique, et de Machiavel, le fin connaisseur de l’âme humaine, se mettent alors sur la piste d’un tueur, dont l’intelligence et l’érudition n’ont d’égale que la perversité. Bien vite, il apparaît en effet que celui-ci agit selon un schéma bien précis, en forme d’énigme, comme un défi lancé aux plus grandes intelligences de son temps. Œuvre monumentale, qui a demandé à son auteur plus de dix ans de travail, 1502 fourmille de détails sur la vie de Léonard De Vinci, dévoile l’histoire secrète qui a inspiré à Machiavel son chef d’œuvre, Le Prince, et recrée avec un rare bonheur ce moment de l’histoire de l’humanité où l’esprit de l’homme – et sa dimension criminelle – est entré dans l’époque moderne. Il ravira autant les amateurs d’Histoire que de suspense.« 
J’ai commencé ce roman il y a près de deux mois, et ai achevé sa deuxième moitié cette après-midi ! Eh oui, je ne sais pas pourquoi mais j’ai eu énormément de mal à avancer dessus, tout en ne lui trouvant aucun défaut (ou très peu). Il faut croire que je n’avais tout simplement pas très envie de lire ce style de livre. Quoi qu’il en soit, je ressors de ma lecture enchantée, et encore un peu perdue dans les méandres politiques et la richesse intellectuelle de cette Italie post-Quattrocento.
Loin d’être un thriller historique, c’est plutôt un « simple » roman policier. Oui, il se passe des choses horribles et les héros sont en danger, mais le rythme reste assez lent et entrecoupé de moments qui sont soit politiques, soit romanesques, soit historiques… C’est super intéressant mais ça n’a rien à voir avec Grangé, Maxime Chattham ou même Dan Brown. Il n’y a pas quantité de péripéties, chacune se passe assez vite et n’apporte pas forcément de dévoilement de l’énigme sur l’instant, et les mystères mêmes sont en assez petit nombre. Le côté historique prime largement, les personnages ont peu de moyens d’enquêter, et donc galèrent pas mal ! 😉
En fait le livre est très riche et touche à beaucoup de domaines, et j’ai véritablement senti les recherches effectuées par l’auteur. D’ailleurs je pense que le foisonnement de références et d’informations peut être vu comme une gêne autant que comme un plaisir : par exemple, l’auteur émaille son texte de mots italiens (en italique, hihi) : vecchia, designo (deux significations, il joue beaucoup avec d’ailleurs ! 😉 ), mappa, palazzo, ainsi que beaucoup d’autres. J’ai fait du latin et un peu d’italien, donc je reconnaissais la plupart des mots, qui sont de toutes façons explicités la première fois qu’ils apparaissent, dans leur majorité. Cependant j’imagine que ça peut perdre certains lecteurs – j’ai une expérience semblable assez mauvaise d’une trilogie de Arthuro Perez-Reverte : je ne conseille pas du tout ces livres à quelqu’un comme moi qui ne connaît rien de l’Espagne et s’en fiche assez royalement ! 1502 est aussi rempli de références intellectuelles et littéraires : le Prince, ainsi que les autres écrits de Machiavel, que je suis super contente d’avoir lu puisque ça m’a permis de relier plein de choses et de me remémorer la plume de cet auteur ; la Divine Comédie dont la lecture ardue a enfin pu également me servir à quelque chose 🙂 ; et tout un tas d’autres références à la mythologie latine, la culture romaine, les mœurs italiennes de la Renaissance, les Borgia, le fait que l’Italie n’était pas unifiée à l’époque mais constituée de différents Etats dépendant de villes (Venise, Florence…), les auteurs antiques classiques tant grecs que latins, les inventions de Leonardo da Vinci, les prémices de la médecine et de la psychologie/psychiatrie… Bien sûr je n’ai pas toutes ces références, et j’ai très bien suivi la plupart des propos de l’auteur (sauf, comme toujours, certains rouages politiques) – mais je pense que quelqu’un qui n’en connaîtrait aucune pourrait se retrouver perdu assez vite.
De même la langue est très riche, et bien que je n’ai pas eu de réelle difficulté à lire le livre je ne le qualifierais pas de lecture facile même au visu du style. J’ai d’ailleurs relevé quelques mots que j’aimerais rechercher dans le dictionnaire.
Je me suis très vite attachée aux personnages, qui ne sont en fait pas si nombreux. Simplement je me suis beaucoup perdue dans les liens politiques et familiaux, me référant souvent à l‘index des personnages sagement prévu par l’auteur au début du livre ! Bien sûr Damiata et Niccolò (Machiavelli, tous les personnages ont tendance à être appelés par leur prénom) ont ma préférence – j’ai juste eu un instant d’hésitation quand Machiavel est passé en tant que narrateur via la plume d’Ennis, vers le milieu du roman – et finalement je m’y suis faite et je l’ai même trouvé plutôt convaincant. J’ai également remarqué et apprécié les citations de l’historien données au début de chaque chapitre – pour moi Ennis lui a rendu dans cet ouvrage un très bel hommage, et je ne doute pas que certains lecteurs vont se tourner vers ses écrits ! J’ai eu nettement moins d’atomes crochus avec Leonardo (da Vinci), qui m’a paru plus proche du savant fou qu’autre chose, et carrément moins humain, tout simplement. On voit venir la romance de trèèèès loin, mais je l’ai trouvé bien intégrée à l’histoire, jolie, et n’empiétant pas trop sur le reste, en un schéma somme toute très classique.
A la fin de l’ouvrage l’auteur donne des précisions sur les faits réels dont il s’est inspiré, et la fiction qu’il y a ajouté. J’apprécie toujours le geste, je trouve que ça donne plus de valeur au livre. 🙂

100 animaux mythiques de l’Histoire

De Caroline Triaud. 2011. Synthèse mythologique et culturelle. Livre mal fichu.
100animauxRésumé : « Depuis la préhistoire, l’animal a toujours accompagné l’homme, et nourri les imaginaires. Cet ouvrage regroupe 100 animaux mythiques, symboles d’une période historique ou d’une région du monde. Le Minotaure, le Sphinx, mais aussi la bête du Gévaudan, le Chat Botté, Idéfix ou Sophie la Girafe… tous sont témoins des relations entre l’homme et l’animal et de l’histoire des hommes et de leur imaginaire.« 
Ce livre présente toutes sortes de bestioles (le terme « animal » me semble peu approprié lorsqu’il s’agit de créatures qui prennent des formes multiples, et hybrides). Chaque créature a une page recto-verso dédiée, ni plus ni moins.
Déjà, à ce niveau, j’ai constaté des déséquilibres : en effet certains sont mieux connues que d’autres, ont une histoire plus étoffée ou plus de légendes dans lesquelles elles apparaissent que d’autres, ce qui entraîne tantôt une impression d’étirage en longueur, tantôt une accumulation de détails compressés et non explicités. Je souhaite bon courage par exemple à ceux qui n’auraient pas lu son histoire, pour suivre l’histoire de Pégase, parce qu’elle est farcie de références à plein d’autres personnages de la Grèce mythologique, qui sont eux très peu explicités (voire pas du tout).
Une petite chose qui m’énerve un peu aussi, c’est que l’auteur aime bien préciser que certaines créatures apparaissent dans « des mangas, des films, des jeux vidéos » – qu’elle ne cite pas – mais elle arrive toujours à caser des exemples de Pokémon ! Ok, Simiabraz est peut-être inspiré de Sun Wukong, mais d’après ce que je lis un peu partout s’il fallait citer des dérivations de ce personnage et de son mythe les séries Saiyuki ou Dragonball auraient sans doute été tout aussi pertinentes, et auraient surtout permis au lecteur de se diriger vers d’autres sources d’information… (fiche d’un Pokémon = 10 lignes pour ceux qui ne verraient pas de quoi je parle !)
En fait autant lorsqu’elle parle de mythologie et de vieux textes elle a l’air de bien respecter les détails et les noms, autant les parties « culture populaire » ont l’air d’avoir été ajoutées « parce qu’il le fallait », ne sont pas toujours pertinentes, et comportent des à-peu-près : « [Fenrir] est un personnage de la saga Harry Potter, où il est figuré sous la forme d’un loup-garou des Mangemorts de Valdemort. » (sic) On ajoutera Walt Disney comme troisième référence majeure destinée au grand public qui n’aurait pas lu les textes anciens… Ou peut-être plutôt aux érudits qui ne mettraient pas le nez hors des ouvrages universitaires !
Parfois il y a également des petites problèmes dans la rédaction, par exemple plus d’une fois un nom est parachuté ; en relisant je comprends qu’il s’agit d’une personne introduite dans le paragraphe précédent – mais pas nommée. J’aurais appris, en passant, que les hiboux ont « une aigrette sur le front » (sic).
Je regrette enfin l’absence d’illu- pardon, il y a en fait de toutes petites vignettes à moitié mangées par le bord de la page, à côté de chaque titre. Autant vous dire qu’elles sont en noir et blanc, et si petites qu’on ne voit en gros rien.
Faut-il pour autant jeter ce livre aux orties ? Peut-être pas. Les mythes sont quelque chose à quoi je m’intéresse depuis très jeune, j’ai donc accumulé suffisamment de lectures pour me montrer plutôt critique sur ce point. Je ne conseille pas spécialement cet ouvrage aux gens dans la même situation, mais je pense qu’il pourrait être attrayant aux yeux d’un novice en contes et légendes, ou quelqu’un qui cherche des sources sur le sujet, car les textes sacrés ou mythiques d’où sont issus les « animaux » sont dans l’ensemble cités.

Nosferas

De Ulrike Schweikert. 2012. Fantasy jeunesse. Très bonne lecture.
Titre original : Der Erben der Nacht – Nosferas, 2008
nosferas
Résumé : Dans l’Europe du XIXe siècle, cinq clans de vampires tentent tant bien que mal de survivre, face aux humains et aussi face à eux-mêmes, puisqu’ils sont tous rivaux. De là la bonne idée, bon gré mal gré, de rassembler et d’éduquer les jeunes des clans afin de les armer contre le monde, et aussi de leur inculquer que de se chercher des noises comme leurs parents c’est pas une solution. Bien sûr, c’est loin d’être gagné d’avance. D’où une atmosphère qui m’a assez fait penser à la découverte de Poudlard par le jeune Harry Potter, ses amitiés et inimitiés du début, etc. En arrière-plan (pour le moment), des intrigues politiques dans l’environnement du pape Pie IX, incluant guerres intestines et luttes de pouvoir, mais aussi chasse aux vampires.
Une très bonne surprise. J’ai pris le livre sans être convaincue (la 4e de couv’ n’est pas terrible non plus), j’ai ensuite eu peur dans les premières pages d’être tombée sur quelque chose de pas très bon, voire mauvais question scénario et personnages… et finalement l’histoire s’est lancée, les personnages sont venus de plus en plus nombreux, se sont complexifiés, et j’étais conquise à la moitié du livre (qui fait près de 500 pages, au fait). Un point très fort de cet ouvrage est le cadre. L’auteur s’est visiblement  bien documentée sur le Rome et l’Europe du XIXe, ce qui donne un aspect historique à un livre qui ne prétend pas l’être puisque l’intrigue reste du ressort de l’imaginaire.
C’est bête à dire, mais c’est une fois de plus un coup de cœur dans la collection Wiz d’Albin Michel (ah tiens, oui, c’est du Albin Michel ?), avec les Angie Sage (Magyk), Jonathan Stroud (La trilogie de Bartimeus), les Fabrice Colin (Bal de givre à New York, Le Maître des dragons/La Malédiction d’Old Haven (qui forment un dyptique)) — bon je regarde le sommaire des titres Wiz et il y en a dans lesquels je ne me plongerai pas en fait ! :p Mais j’aime tout de même beaucoup cette collection.
Indications sur le livre : premier d’une saga (Der Erben der Nacht) dont le titre général n’est pas encore traduit en France (« Les Héritiers de la nuit », merci Reverso) parce que l’éditeur n’était prétendument pas sûr d’arriver à les vendre [mode élitiste on] c’est sûr quand c’est pour importer du caca de vampires des pays anglo-saxons on sait qu’on a le public, mais pas pour de la fantasy allemande de meilleur niveau, sait-on jamais que les gens soient trop cons pour lire ça [/mode élitiste off]. Cinq tomes en tout sont parus en Allemagne.
Tome 1 : Nosferas (2008)
Tome 2 : Lycana (2008)
Tome 3 : Pyras (2009)
Tome 4 : Dracas (2010)
Tome 5 : Vyrad (2011)
(en cherchant ces infos, et d’autres sur l’auteur, j’ai découvert un blog qui a l’air génial. Et le blog de l’auteur.)