Blade Runner

De Philip K. Dick. J’ai Lu, 2007. Science-Fiction. Excellente lecture. [251 p.]

Titre original : Do Androids Dream of Electric Sheep ?, 1968 ; trad. par Serge Quadruppani

Paru précédemment en français sous les titres Robots blues et Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ?

bladerunnerRésumé : « Les androïdes Nexus 6 ne sont pas de simples robots. Leur intelligence est bien supérieure à celle de certains humains. Et parce qu’ils ne supportaient plus l’âpreté de la vie sur Mars, huit d’entre-eux ont assassiné leurs gardiens avant de s’enfuir sur la Terre. La brigade spéciale des Blade Runners a mis Rick Deckard, son meilleur chasseur d’androïdes, sur l’affaire. Les renégats seront difficiles à coincer, même avec le test standard… Mais la paie proposée devrait lui permettre de concrétiser son rêve : remplacer son simulacre électrique de mouton par un vrai ! Cependant, quand surgit face à lui la belle Rachel, toutes ses certitudes sont remises en cause…« 

Poussée par l’arrivée d’une nouvelle adaptation de ce monument de la SF (après un article sur Asimov j’ai l’impression de me répéter !) sur grand écran, j’ai sorti de ma PàL ce petit opus récemment arrivé (cette année !) pour me plonger une fois de plus dans les univers frisant parfois l’absurde, sans toutefois jamais paraître si délirants, de Sieur K. Dick.

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Le Livre de l’Énigme, T.1 : Source des Tempêtes

De Nathalie Dau. Les Moutons Électriques, 2016. Fantasy. Très bonne lecture. [443 p.]

sourcetempetesRésumé : « Les ténèbres ont un cœur de lumière. Je l’ai su quand j’ai vu l’enfant dans la tempête. J’ai entraperçu l’azur de sa magie étrange et intense, mon univers s’est métamorphosé. Moi qui me sentais si seul, si désespéré, j’ai découvert soudain pourquoi j’étais venu au monde : pour protéger celui qu’on m’a donné pour frère. Un frère pas tout à fait humain, pas tout à fait possible. Le protéger des autres et de lui-même : des décisions qu’il voudrait prendre afin de résoudre sa maudite Énigme. Car ce petit est doué pour se mettre – nous mettre – en péril ! Mais j’ai la faiblesse de croire que je suis plus têtu que lui. // Une nouvelle grande saga de fantasy. Les mages bleus, servants de l’Équilibre, ont été décimés, mais l’un des leurs a survécu au prix de son honneur, guidé par le besoin impérieux de transmettre la vie. Ses fils : Cerdric et Ceredawn, nés pour devenir les héros de ce voyage riche en périls, depuis les Marches jusqu’au séminaire d’Atilda.« 

Livre lu dans le cadre d’un partenariat avec Les Moutons Électriques

(Hmm… tiens la dernière image que j’ai hébergée sur le site fait aussi référence à deux frères…)

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Morwenna

De Jo Walton. Denoël, 2014. Fantastique. Coup de cœur pour ce bon bouquin. [334 p.]
Titre original : Among Others, 2010.
COUV_morwenna.inddRésumé : « Morwenna Phelps, qui préfère qu’on l’appelle Mori, est placée par son père dans l’école privée d’Arlinghurst, où elle se remet du terrible accident qui l’a laissée handicapée et l’a privée à jamais de sa sœur jumelle, Morganna. Là, Mori pourrait dépérir, mais elle découvre le pouvoir des livres de science-fiction. Delany, Zelazny, Le Guin et Silverberg peuplent ses journées, la passionnent.
Un jour, elle reçoit par la poste une photo qui la bouleverse, où sa silhouette a été brûlée. Que peut faire une adolescente de seize ans quand son pire ennemi, potentiellement mortel, est une sorcière, sa propre mère qui plus est? Elle peut chercher dans les livres le courage de combattre.« 
Je me suis sentie très proche de cette jeune fille un peu solitaire, bibliophile convaincue et passionnée de science-fiction. Dans ce livre il y a énormément de choses que j’aurais moi-même aimé exprimer, ou exprimer plus souvent, ou mieux, ou plus tôt.

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Pensées pour moi-même

De Marc-Aurèle. Flammarion, 1999. Philosophie. Excellente lecture. [222 p.]
marc1Résumé : « « On sent en soi-même un plaisir secret lorsqu’on parle de cet empereur ; on ne peut pas lire sa vie sans une espèce d’attendrissement ; tel est l’effet qu’elle produit qu’on a meilleure opinion de soi-même parce qu’on a meilleure opinion des hommes. » – Montesquieu.« 
Je découvre ici un petit bijou philosophique, dont on je n’avais jamais entendu parler, et pourtant ! Je suis tout à fait d’accord avec Montesquieu. 🙂
La première chose qui m’a frappée c’est la facilité avec laquelle ce recueil de pensées se lit. La traduction y est peut-être pour quelque chose, mais on sent tout de même une pensée très nette, claire, posée et concise. Il s’agit principalement de petites maximes, de conseils, de réflexions souvent toutes bêtes sur la vie. Il parle d’Épicure, et en effet j’ai retrouvé ici un peu de la philosophie des Anciens, que ce soit Aristote, Platon, Socrate ou Épicure (de ce que je connais, de mon impression, de ce que j’en ai retenu – j’espère ne pas faire bondir de philosophe aguerri par cette comparaison ^^). Je pense spécifiquement à ces auteurs à cause de leur pragmatisme, de leur idéalisme dans certains cas, et de leur modération et positivisme toujours.

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Incursion dans le boudoir des vampires de la nuit de l’ombre des ténèbres éternelles*

vampire
* Ou comment tenter de faire la lumière sur un sujet parfois obscur, obscurci, abscons.
  Lorsque j’ai dit que j’avais bien aimé Orgueil et préjugés on m’a fait la réflexion : « Mais… d’habitude tu n’aimes pas les romances ? » – et je trouve que c’est une réflexion très pertinente.
Pourquoi est-ce que cette lecture a été si plaisante, alors que le résumé de Twilight et sa première page (lus après quelques critiques de copines) m’ont fait immédiatement reposer le livre sans aucun regret, que je n’ai lu une paire de Harlequin que pour « être sûre » que le style ne me plaisait pas (mon Dieu qu’est-ce que c’est ch***t !!), et que maintenant forte de mes expériences j’ai tendance à évincer de mes choix de lecture toute romance, ou presque,  clairement définie comme telle ?

Une question d’intolérance

      Au risque de passer pour une élitiste, ce que je suis peut-être tout simplement :p, je dirais que le style m’importe beaucoup, dans certains cas. Je crois que c’est en grande partie pour ça que les sous-genres bit-lit, urban fantasy et autres me rebutent autant. Lire du cucul, du moralisateur, du trop stéréotypé, pourquoi pas, après tout Le Petit Lord Fauntleroy, le Jardin Secret, et d’autres livres du même acabit, dont quelques romances (d’Emily Brontë principalement), font partie de mon patrimoine de lectrice depuis longtemps, et même si ce sont des classiques ce ne sont pas toujours à proprement dit des chefs-d’œuvre ! La grosse, l’énorme différence que je fais entre ces derniers (par exemple) et les tendances romanesques YA actuelles (par exemple aussi, puisqu’on en parle beaucoup), c’est le style, la manière dont c’est amené, même si le fond peut toujours paraître gnangnan (ou l’est carrément).
wuthering heights
      On accuse beaucoup les gens qui ne suivent pas la vague (je me sens visée parfois) de faire preuve d’intolérance. J’évite de sortir « Twilight, c’est de la merde » en face des gens, bien que je n’en pense pas moins. La forme exacte et polie est « je n’aime pas cette histoire, et le style très médiocre ne me permet pas de passer au-dessus de la romance omniprésente et des personnages sans saveur qui je le sais vont me soûler extrêmement rapidement ». Mon sentiment n’est pas tant que les gens qui lisent ça font preuve de manque de culture, ou d’estime de soi. Bien sûr je me sens très éloignée des gens qui ne lisent pas du tout les mêmes genres que moi, comme tout un chacun. « Chacun est libre de lire ce qu’il veut, d’aimer des genres différents ou un seul genre, de détester d’autres genres », ça tout le monde le dit, c’est assez vrai, et ça n’empêche pas les gens de ne pas copiner sans regrets quand ils ont des goûts littéraires opposés, et de prendre un peu de haut les gens qui lisent des trucs plus « faciles » que nous (on aime bien le mot « tolérance », mais je pense qu’il y a ici une certaine réalité sociale ou psychologique – on est toujours assez content de soi quand on lit un truc compliqué, vous ne pensez pas ? Comportement à corriger, certes ;)).
(Je suis partie sur les tendances romanesques dites « fantastiques » actuelles, plus que sur les autres tendances romantiques, tout simplement parce que ni Danielle Steel ni Nora Roberts ni les romans populaires ni leurs lectorats n’ont de ce que je sais déclenché de polémique, de revendication du genre, etc. aussi passionnés – et que j’en suis toujours à réfléchir sur le pourquoi du comment des réactions de part et d’autres des deux « camps »)

Objectivité, diversité

      Non, ce qui me hérisse c’est quand les lecteurs de bit-lit (ou autre, mais encore une fois c’est ce qui est au-devant de la scène littéraire en ce moment) me sortent des inepties qui dénotent de mon point de vue un manque total de regard objectif sur leurs propres lectures : « Stephenie Meyer elle écrit trop bien.«  [t’as pas dû lire grand chose dans ta vie, alors… et sauter toutes les lectures scolaires, qui bien que souvent ennuyeuses de mon point de vue, sont là pour te montrer quels styles il peut exister, les différences de niveau, etc ! Dis simplement que tu aimes son style fluide, ne tente pas de me faire croire que c’est le nouveau Proust -_-] « Dans X il y a de la magie, j’aime X donc j’aime aussi Y. » [sans commentaire, surtout quand les gens me le sortent tout à fait sérieusement – enfin celui-ci est plus drôle que triste] Comparaison (positive, égale) plus que fréquente entre Bram Stoker et les univers vampiriques actuels. [Mis à part les vampires en tant que personnages… je vois pas °_° Vous avez lu Stoker, bien sûr ?… Ah bon, en plus, vous l’avez vraiment lu ???] Je me hérisse autant quand des gens regardent de haut Harry Potter, le considérant comme de la « lecture débile pour les gamins » – ceux-là en général ne connaissent pas plus d’auteurs jeunesse que ceux cités plus haut n’ont lu de fantastique (des siècles passés).
      Dites que vous aimez, n’aimez pas, n’accrochez pas, ou aimez ou pas les univers. Mais arrêtez juste de comparer ce qui n’est pas comparable. Je ne me pique pas de lire du Sir T. Mallory en lisant du Tolkien. Crichton n’est pas C.S. Lewis. S. Meyer n’est pas A. Stoker. La littérature jeunesse n’est pas comparable avec les albums, ni les premières lectures. Morpurgo m’a l’air plus mature que beaucoup de romans édités en « Black Moon », d’après ce que je lis, ce qui n’empêche pas certains de se retrouver plus dans les héroïnes ados que dans les enfants héros des romans de Morpurgo, je le conçois. Les styles diffèrent autant que les thèmes larges ou univers, et peuvent d’autant plus différer lorsqu’ils sont écrits à des époques différentes. Je peux vous trouver 10 livres sur les vampires qui s’adressent à des publics différents, de manière différente. Malgré les subdivisions en genres et sous-genres chaque auteur a sa propre plume (sauf ceux qui n’écrivent ni avec originalité ni avec style, mais c’est assez rare). C’est là toute la diversité, toute l’âme de la littérature. La urban fantasy, c’est la urban fantasy, point barre (pareil pour les autres catégories). Je veux bien croire qu’il y a dedans des auteurs meilleurs que d’autres, des histoires mieux racontées, des séries plus vendues, mais n’allez pas me faire prendre ça pour les « dignes successeurs » (au sens de « compatriotes », « voisins », « collègues », voire « frères et sœurs ») de Shelley, Sheffield, Dunsany ou Le Fanu ! Ce sont deux générations différentes (voire trois…), des styles tout à fait différents, des ambiances différentes… c’est tout aussi ridicule que de comparer certains titres de S-F avec de la fantasy, ou certains auteurs très spéciaux entre eux. D’ailleurs les lectorats ne se croisent pas forcément du tout, au contraire de ce que certaines tendances « geeks, nous sommes tous geeks et aimons ce qui est fantastique«  aimeraient le faire croire :D.
Il est vrai que la publicité des éditeurs les conduit fréquemment à mélanger torchons et serviettes, à comparer par exemple Pullman et Tolkien (vu dernièrement). J’ai lu les deux, et mis à part qu’ils aient vécu tous deux à Oxford et utilisent des éléments merveilleux dans leurs livres, il n’y a juste aucun point commun entre les deux styles, ni leurs univers. Je pense que j’en trouverai d’autres tantôt, c’est vraiment très commun de nos jours (snif, dire que les éditeurs sont censés transmettre la culture… je ne sais pas à quel niveau il y a souci, mais c’est parfois cocasse !).

Les limites de la tolérance – les goûts, la subjectivité – d’où le besoin d’analyse ?

       imitationJ’ai lu un certain nombre de choses débiles mais distrayantes, quasiment à chaque fois sur le ton comique, même si j’éprouve le besoin de lire aussi d’autres choses plus intellectuelles en alternance. Dans la catégorie « lectures difficiles à mettre en avant » j’ai lu Lord of the Ringards (parodie du Seigneur des Anneaux), j’ai bien ri malgré les obscénités et stupidités récurrentes, je l’ai même relu. Cela n’en fait pas le bouquin de l’année, ni un livre que je vais recommander à n’importe qui. Quand des gens me disent : « j’ai pas pu lire le Seigneur des Anneaux, cet auteur est chiant, il fait trop de descriptions », je n’ai rien à répondre. L’argument est juste. Je ne recommande pas non plus Tolkien à tous. A la décharge de l’urban fantasy (et alii), on peut considérer Le Fanu (qui a aussi écrit sur les vampires) comme un vieux type moralisateur qui écrit de manière totalement archaïque et parfois pédante (et si ça ne s’applique pas tout à fait à lui, ça s’applique à Stoker et Dunsany).
      Par conséquent quand je dis « je ne veux pas essayer de lire Twilight parce que je n’aime pas les romances« , et que la lectrice fana en face de moi essaye malgré tout de m’embobiner et m’amener à perdre mon temps à lire ça en me parlant de questions politiques qui seraient aussi présentes dans le livre, etc, [alors que partout  j’entends que oui, la romance est le cœur de l’histoire, et que oui c’est totalement stéréotypé – y compris de copines qui me connaissent, qui ont une  culture littéraire diversifiée, et ont elles lu le livre en entier (et même le tome 2), et me répètent que franchement le style est très simple et l’univers pas plus développé que ça entre les scènes de mamours] —- j’ai vraiment l’impression d’être prise pour une abrutie… Et ce genre de discours a tendance à se répéter.
      Pourquoi ? Les lecteurs de Danielle Steel se cantonnent eux toujours à un : « j’adore les belles histoires d’amour » tout à fait légitime et non opposable. Qu’a donc apporté cette nouvelle vague littéraire « populaire » ? Qui sont vraiment les lecteurs imbus d’eux-mêmes (ou « aveuglés »), intolérants ? (Je sais que la dernière phrase peut paraître désagréable, mais je pense que la question vaut la peine d’être creusée dans les deux sens). Je veux bien tenter d’être conciliante, mais arrêtez aussi de placer ce p**** de piédestal sous vos propres lectures, ou de raconter du n’importe quoi n’importe comment juste pour convaincre tout le monde que si vous aimez quelque chose ça a forcément toutes les qualités possibles et que ceux qui n’aiment pas ne sont que des aveugles face à la si belle prose de vos auteurs préférés…

Vers un début de compréhension

    cn  L’autre jour, aux Imaginales, je suis passée à l’attaque. Ce genre de question/conflit me taraude, me titille, et j’ai abordé le stand du Chat Noir (éditeur spécialisé en bit-lit, urban fantasy et steampunk, je crois), auquel se trouvait entre autres un jeune homme* qui m’a agréablement surpris. J’ai délibérément choisi de montrer mon côté « élitiste » en approchant du stand, ne me suis pas cachée de mon dédain pour le genre en manipulant les livres, toujours à la recherche d’un auteur, un titre qui ne me rebuterait pas autant que les autres (malgré tout mon fiel, je reste quelqu’un d’obstinément curieux ! 🙂 ), et ai attendu impatiemment la réaction adverse (vicieuse ? oui, mais à des fins constructives :D).
*Mathieu Guibé, auteur de son état ! (je l’ai su par la suite)
      Quelques minutes plus tard j’étais engagée dans une conversation – une vraie ! Pas une bataille de « C‘est de la merde » – « Non c’est pas vrai c’est génial« . Moi, expliquant mes réticences sur le genre, tentant de mettre des mots sur ce qui ne me plaît pas, me dérange, n’arrive pas à aimer en aucun cas. Lui, écoutant, écoutant vraiment, concluant que Oui, la romance reste présente dans leurs collections à un sacré pourcentage, et oui, souvent centrale au livre. Et les super héroïnes, les gonzesses qu’ont tellement de qualités qu’elles en sont imbuvables ? Oui, assez vrai aussi, cependant pas entièrement. Quelques titres n’en font pas partie – Mais ceux-là non plus ne me plaisent pas, ne m’attirent pas, trop simplistes peut-être ? A moins que je me trompe, après tout je n’en ai quasiment pas lu, juste quelques pages ici et là, et les résumés, plein de résumés, qui toujours, avec les échantillons de texte, me rebutent… « Ah, mais oui, ça reste du divertissement. C’est un des points forts du genre : style simple, histoires simples aussi, ou mises à la portée de tous. Pareil pour les personnages, un minimum diversifiés mais parfois aussi assez semblables d’un livre sur l’autre. Pour divertir les lecteurs, avant tout, pas les faire réfléchir ou quoi que ce soit.*
>>> Illumination, quelque part. Le roman populaire est assez fameux pour son rôle de divertissement. Ce genre m’agace aussi prodigieusement. CQFD ? Je n’aime pas les livres intrinsèquement divertissants ? à confirmer.
 * Je reporte cette conversation d’après mes souvenirs, ce que j’en ai retenu qui a alimenté ma réflexion. Cela n’est en aucun cas imputable aux éditions du CN elles-mêmes, leur discours officiel ou commercial, etc.

Conclusion

         J’aimerais que plus de gens sachent faire la différence entre « aimer » et « apprécier à sa juste valeur »**.
      Je ne parle pas d’assumer ses lectures ou pas, ou de classer les lectures en « vaut le coup » et « ne vaut rien », ce qui reste imputable à chacun et rarement justifiable. Il s’agit plutôt d’être capable de parler d’un livre non pas en termes de ventes, de public visé ou de thèmes, mais en termes de contenu effectif : style simple, fluide, ou plus recherché, voire difficile ; histoire simpliste, moyenne ou très élaborée ; mise en œuvre de stylistique, d’originalité dans la conception du texte, des évènements, de l’intrigue ; reprise ou pas d’un thème, avec plus ou moins de brio, etc. Je pense très sincèrement qu’une grosse partie de ce genre de conflits ou de tensions résulte de l’ignorance ou de maladresses. J’espère avoir l’occasion de mener plus de conversations constructives comme celle présentée ci-dessus, même si je doute jamais adorer les sous-genres abordés ici, mais l’un n’empêche pas l’autre.
** Je me rends compte que tout ça peut être considéré comme un problème de fond qui dépasse largement le domaine des livres, même si je ne me lancerais pas plus loin. Education, personnalité, curiosité, entourage et conseil aussi… sans parler de la culture littéraire au sens le plus large. Beaucoup de facteurs qui me semblent pouvoir faire partie de l’équation.

Les Cornes d’Ivoire, T.1 : Afirik

De Lorris Murail (frère de Marie-Aude et d’Elvire). 2011. Uchronie, « historique » jeunesse. Très bonne lecture, presque un coup de cœur.
afirikRésumé : « Le cours de l’histoire s’est inversé. Désormais, des Maîtres noirs règnent sur les deux continents, l’Afirik en plein essor et l’ancienne Europe, aujourd’hui dévastée par les épidémies. Des bateaux ont conduit en Afirik par dizaines de milliers des esclaves blancs, ceux qu’on nomme les Cornes d’Ivoire. Du lointain passé la jeune Mari ne sait pas grand-chose. Esclave dans une plantation de Kassamansa, elle rêve d’en apprendre davantage sur le pays de ses ancêtres. Leur langue s’est perdue et, de leurs traditions et croyances, il ne subsiste que quelques rites obscurs. Un drame va faire basculer sa vie… »
Je n’ai plus lu de Marie-Aude Murail depuis bien longtemps mais je suis à peu près sûre de me souvenir que son style et celui de son frère sont assez semblables. Une plume posée, tranquille, et pourtant terriblement mordante à certains moments. Des histoires presque banales, mais cependant poignantes, des sujets sensibles traités de façon qui « passe » très bien. Ici un long fleuve de 512 pages pas si tranquille. Une héroïne ainsi que toute une compagnie de personnages secondaires complexes, souvent attachants, toujours travaillés psychologiquement. Personne n’est parfait, on suit cette histoire fictive qui sonne étonnamment vrai, fourmillant de détails qui semblent issus de témoignages plutôt que de l’imagination de l’auteur. Qui sait ?
L’autre point fort de cet ouvrage est sa manière non seulement d’inverser mais également de distordre l’histoire telle qu’on la connaît. Les Blancs ne sont pas simplement « à la place » des esclaves noirs du XIXe et vice versa ; l’auteur a su tisser toute une trame historique quelque peu différente, même si ressemblante, autour de l’espace-temps dans lequel il nous invite.
Vivement le tome 2 🙂