Parleur, ou les chroniques d’un rêve enclavé

De Yal Ayerdhal. J’ai Lu, 1997. Utopie/Fantasy. Excellente lecture. [376 p.]

Illustration : Gilles Francescano

jl4317-1997Résumé : « «Il est arrivé un matin, au petit matin, le cinquième jour de la fermentation, quand le miel prend sa première amertume. C’était l’année où le Prince adouba son aîné, l’année où il lui confia la ville pendant qu’il guerroyait pour son Roi sur d’autres rivages. Il est arrivé avec le vent de mer, un havresac au bout du bras droit, le chat sur l’épaule gauche.» C’est ainsi que Vini, l’épistolière, recueille Parleur et le présente à ses amis : Mescal le magicien, Halween la Mante, Gabar l’Ours, Teng le Gros, Qatam le guerrier, le Vielleux… C’est ainsi depuis des siècles sur la Colline, sous le joug des Princes de Macil et de la Citadelle… Parce qu’on naît pauvre et qu’on le reste, en redoutant la Garde et les questeurs d’impôts, en tremblant devant le Prévost ou le Connétable, en agonisant doucement. C’est ainsi, mais le frère de Vini écrivait que ce ne pouvait pas toujours l’être. Et Parleur dit que cela doit changer. »

J’ai entamé cette lecture directement après Techno Faërie car cela me semblait cohérent, les deux auteurs ayant été compagnons de vie jusqu’au décès récent d’Ayerdhal, l’année dernière. Je me rappelle d’un grand monsieur avec plein de cheveux, vu de loin aux Imaginales une année. J’avais trouvé ce livre en occasion, il y a déjà un moment, il traînait dans ma PàL avec plein d’autres, c’était le moment de le sortir.

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La Controverse de Valladolid

De Jean-Claude Carrière. Pocket, 1993. Roman historique. Très bonne lecture. [189 p.]

9782266054010Résumé : « En 1550, une question agite la chrétienté : qui sont les Indiens ? Des êtres inférieurs qu’il faut soumettre et convertir ? Ou des hommes, libres et égaux ? Un légat envoyé par le pape doit en décider. Pour l’aider, deux religieux espagnols. Ginès de Sepulveda, fin lettré, rompu à l’art de la polémique, et Bartolomé de Las Casas, prêtre ayant vécu de nombreuses années dans le Nouveau Monde. Le premier défend la guerre au nom de Dieu. Le second lutte contre l’esclavage des Indiens. Un face-à-face dramatique dont l’écho retentit encore.« 

J’ai entamé cette lecture par pure curiosité : l’amie qui me l’a recommandée l’a étudiée en 1ère, et m’a simplement dit que c’était sur un des tournants de l’Histoire, et que ça se lisait bien. J’aime bien l’Histoire mais ce n’est pas une passion non plus pour moi ; il y a tant à apprendre et à retenir que j’ai tendance à oublier des bouts par-ci et des bouts par-là qu’il faut mieux me rappeler de temps en temps ! Cependant ce livre paraissait court, le résumé pouvait tout autant vendre du barbant que de l’intéressant, alors je me suis dit pourquoi pas.

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Journey to the River Sea

D’Eva Ibbotson. 2001. Roman aventure jeunesse. Excellente lecture. [295 p.]
Titre français : Reine du fleuve
Résumé : « The girls in Maia’s class told her what to expect when she reached the Brazilian jungle.’There are huge mosquitoes which bite you. »You turn as yellow as a lemon and then you die.’ But Maia, an orphan, can’t wait to start the long sea voyage. She is to begin a new life with relatives she has never met, a thousand miles up the Amazon river. And Maia’s classmates could never, even in their wildest dreams, imagine the adventures that await her on the shores of the River Sea. »
Waouh. Eva Ibbotson vient de rejoindre Morpurgo et Ruiz Zafon sur l’étagère des Fabuleux Auteurs Jeunesse (parmi ceux que j’ai lu suffisamment récemment pour que je me souvienne à quel point ils sont génialissimes – je suis probablement tombée sur des perles entre mes 7 et 10 ans sans me souvenir des auteurs).

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Je suis une fille… ou pas.

Depuis que je suis arrivée sur la blogosphère j’ai commencé à m’intéresser aux sujets, discussions et débats autour du féminisme, du genre, et de tout le tintouin. C’est somme toute assez nouveau pour moi, je n’ai pas d’activistes dans la famille ni ne suis militante en quoi que ce soit moi-même… ou plutôt c’est ce que je croyais avant de lire un certain nombre de choses avec lesquelles je me suis retrouvée forcée de tomber d’accord, voire dans lesquelles je me suis retrouvée complètement. Je me considère donc comme une semi-féministe, même si au moins 3 articles m’ont déjà clamé que ça n’existait pas, avec arguments à l’appui (que visiblement je n’ai toujours pas compris ou accepté entièrement – laissez-moi faire mon chemin analytique, bordel :p).

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Ah ! Je ris…

On entend souvent
Si  souvent
Trop  souvent  :

« Il ne faut pas se moquer ».

L’appel à la tolérance est de mise, en ce XXIe siècle si politiquement correct. Plus rien n’est critiquable, si ce n’est le gouvernement, et les vilaines holdings, et encore. Le bas peuple, victime des grands de ce monde, doit se tenir les coudes en toutes circonstances, faire preuve de cécité les uns envers les autres, ne pas se critiquer, ne pas relever les erreurs, car « errare humanum est« , et cætera.

FOUTAISES.

A l’époque du tout numérique, de cette exhibition totale et incontrôlée, de ce narcissisme convoité, imité, assumé, de l’expansion sans limite des réseaux sociaux, je n’en peux plus de voir des choses idiotes me passer sous le nez, je ne suis pas la seule, et je pense que rien ne sert de se voiler la face, ni de contenir mon hilarité.
Tu veux t’exprimer en ligne, tu balances des

Conneries

Fadaises

Inepties

Salades

Sornettes

Niaiseries

Bêtises

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==> Tu assumes. Et en disant ça, je ne veux pas dire : tu comptes sur le bon sens social et l’hypocrisie la politesse des gens pour ne rien te dire* , car on ne se connaît pas, et que l’éducation ne passe que par les parents et les professeurs, c’est bien connu. Non, tu t’exposes, toi scribouillant anonyme, au placardage public, à l’opprobre, au lynchage, et aux fous rires pas toujours très gentils. En passant, j’espère que ça te servira de leçon si tu te reconnais ci-dessus et que tu réfléchiras deux secondes avant de poster la prochaine fois.
(Bon, en fait, je ferme quand même ma grande bouche dans 97% des cas, sinon j’aurais pas fini – mais je catégorise sans pitié, ôte des points de valeur, et finis par supprimer ou bloquer des contacts ou pages, sans compter la mauvaise pub qui va avec :D)
Je m’en fous que tu aies 14, 18 ou 57 ans. Le bon sens, on est censé en avoir à tout âge**. Et les écrits restent, comme le prouvent certains sites qui recensent les Perles du Net.

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* ce qui n’a d’ailleurs jamais été précisé dans ce fameux article que tout le monde a tendance à invoquer à tort et à travers :
« Art. 11. La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi. » (Source : Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, http://www.legifrance.gouv.fr/Droit-francais/Constitution/Declaration-des-Droits-de-l-Homme-et-du-Citoyen-de-1789)
** Il va de soi que je suis plus tolérante que ce que cet article peut faire croire envers les gens qui ont une culture différente, ou une éducation de moindre niveau, ou pas forcément pointue dans tous les domaines ! – et également envers ceux qui n’affirment pas clairement une ineptie, mais proposent un point de vue. Mais ça m’énerve prodigieusement qu’autant d’abrutis ne réfléchissent pas 2 secondes avant de poster leurs billevesées, en partant du principe que s’ils ont quelque chose à exprimer les lecteurs ont forcément une obligation de tolérance absolue, voire d’acceptation.
Edit : Ce coup de gueule a été écrit il y a des mois, mais reste d’actualité. :p

Ceux qui osent

De Pierre Bordage. Uchronie (S-F) jeunesse. Très bonne lecture.
T.3 de la série. Autres titres : Ceux qui rêvent, Ceux qui sauront.
ceuxquiRésumé : « J’ai envie de pleurer sur cette humanité qui refuse d’être humaine, pleurer sur ces malheureux prêts à défier tous les dangers, toutes les souffrances pour goûter quelques miettes de bonheur. Pleurer sur les fous qui refusent de partager les richesses, les terres et le savoir. Ni les possessions ni le pouvoir ne rendent heureux.
La guerre fait rage entre les royaumes coalisés des Amériques et l’Arcanecout, dernière terre libre pour Jean et Clara. Jean est parti sur le front et se bat auprès des troupes alliées, avec son ami indien Elan-Gris.
Il a laissé Clara seule, dans les hauteurs de San Francisco. La ville est délabrée, la population meurt de faim. Mais la jeune femme se bat avec ses compagnes d’infortune pour survivre.
Jean et Clara connaîtront-ils un jour le bonheur d’être ensemble ?« 
      Le très gros plus de ce livre (et des deux autres tomes parus avant) c’est sa fluidité, que ce soit dans son style ou dans ses péripéties. Je ne me suis pas ennuyée du tout dans toute la série, on passe les chapitres les uns après les autres sans s’en rendre compte et c’est vraiment très agréable.
J’aime beaucoup les personnages, même si ils ont certains côtés parfois un peu trop vertueux ou stéréotypés, mais ça va quand même. Je trouve qu’à eux seuls ils font presque toute la force de cette série : les décisions qu’ils prennent, comment ils les prennent, leur manière de faire face aux difficultés de ce monde en crise majeure. Clara a des tendances lyriques, surtout dans ses lettres à Jean (voire début du résumé), mais heureusement à côté elle est décrite comme débrouillarde, courageuse, et plutôt futée. Les personnages secondaires sont dans l’ensemble un peu plus complexes, avec des particularités physiques ou psychologiques, c’est plutôt bien pensé. L’environnement, le cadre de l’histoire (politique, économique, sociale) est suffisamment décrit et explicité pour qu’on s’y retrouve, et que l’univers de Bordage ait de la matière, mais pas trop non plus, et à intervalles suffisants pour qu’on puisse aussi profiter des aventures des héros sans se retrouver enseveli sous une tonne d’information.
Un vrai bon livre de S-F, certes en apparence plus simple que d’autres auteurs car s’adressant à un public jeune, mais qui aborde pourtant des thèmes et questions plutôt graves (la liberté, les systèmes politiques, la parité homme/femme, les gouvernements, l’embargo…), sur plusieurs centaines de pages (en comptant les autres tomes, qui ne constituent ensemble qu’une seule histoire), avec un ton juste.

L’Étang aux libellules

D’Eva Ibbotson. 2011. Roman jeunesse / historique. Excellente lecture.
Titre original : The Dragonfly Pool, 2010
etangRésumé : « L’étang aux libellules était hors du temps, à l’abri de la guerre : protégé, intime, magnifique… Le roi de Berganie vient d’être assassiné pour s’être opposé à Hitler. Un groupe d’enfants va venir en aide au jeune prince héritier désormais menacé. A leur tête, une fougueuse jeune fille, Tally, éprise de liberté et « résistante » sans le savoir. »
Je me souviens avoir adoré l’Etoile de Kazan, du même auteur. Je retrouve en elle un peu de Morpurgo, un peu de Carlos Ruis Zafon (avec les accents en plus :p), un peu de Mourlevat : cette douceur empreinte de tristesse, ces récits en même temps neutres et terriblement poignants, qui mettent en scène des enfants avec des interrogations d’adultes, tellement moins naïvement que ce qu’on préconçoit parfois de la littérature jeunesse ! Pas d’adolescents trop typiques en mal d’être ici (ou peu), ni d’échappées lyrico-dramatiques, mais, beaucoup plus près de nous, beaucoup plus justement aussi à mon sens, de vraies angoisses, des questionnements : qu’est-ce que la liberté ? Peut-on vivre libre ? Comment se battre au nom de principes justes ?
Les personnages sont tous très intéressants et attachants, avec leur personnalité et leurs problèmes, parfois aussi leurs secrets, mais toujours dans cette harmonie terriblement réaliste, même si la Berganie n’existe peut-être pas. L’intrigue se déroule sans accroc, avec pauses justement dosées et cohérence.
Un livre comme je les aime, qui me donne envie de lire plus, de rencontrer plus de gens, de continuer à me questionner, et de vivre ma vie.
Le: Dans ce livre, on trouve plein d’otaries. Des otaries dans une rivière d’Angleterre, dans un étang en Berganie… Je pense que c’est simplement le mot « otter » qui a été mal traduit. Otter, otarie… ça sonne pareil, non ? Mais bon, « otter » ça veut dire « loutre », et tout de suite ça fait moins exotique, mais carrément plus compréhensible 😉

 

NB : je viens de faire une petite recherche sur ce livre, et j’apprends que c’est le dernier de l’auteur : elle est morte en octobre 2010. 😦