Éd. par Roger et Laura Loomis. Modern Library College Editions, 1957. Anthologie. Bonne lecture. [424 p.]
NB : romance signifie plutôt roman (de chevalerie, d’aventures souvent en contact avec le surnaturel) en littérature médiévale. 😉 Il s’agit souvent de textes beaucoup plus courts que les romans modernes, mais pas toujours. Certains romances sont effectivement également des romances, comme Tristan et Iseut ou Aucassin et Nicolette.
J’ai trouvé ce livre en occasion je ne sais plus où, peut-être bien à l’une des ventes annuelles organisées par la American Library in Nancy qui en profite pour se débarrasser de ses ouvrages doubles ou trop vieux, trop peu empruntés (comme quoi le désherbage c’est cool !) à des prix totalement dérisoires. Jusqu’à l’année dernière il était rangé au fond de l’étagère, dans la deuxième rangée, vous savez, celle où dorment les livres oubliés. Lorsque j’ai voulu tenter de lister les ouvrages de ma bibliothèque l’année dernière je l’avais ressorti pour justement le lire sans trop tarder.
Sans être une vraie experte de textes médiévaux il s’agit tout de même d’un domaine qui m’intéresse plutôt, et dans lequel j’ai quelques connaissances grâce à quelques recherches menées ici et là au gré des textes qui s’en inspirent (légende arthurienne notamment) ; j’avais aussi pris l’étude de textes médiévaux en option en L3 d’Anglais si je me souviens bien. Le prof était très sympa, le cours passionnant, je me suis un peu ramassée à l’examen mais j’en ai un bon souvenir tout de même. Ceci dit le thème est vaste et ce livre m’a permis de rattraper quelques lacunes… non sans mal.
« Gramercy, » said the maiden, and spoke shyly. « God give thee all good fortune, Sir Knight; yet methinks I have somewhat against thee. »
Within this thirty days I and two other merchants set sail to go to Spain, and about a eight days agone a storm arose which separated us, and drave me northwards. ~ Tristan and Isolt
En effet je retiens de ces textes une langue anglaise joliment archaïque comme vous pouvez le constater (ou pas…) ci-dessus, des archétypes intéressants autant pour l’original que pour leurs nombreuses reprises et adaptations, des titres que je connaissais déjà ou non (j’ai notamment découvert Aucassin et Nicolette, qui est un conte français au départ, comme d’autres présentés dans ce recueil), mais aussi d’ennuyeuses longueurs et répétitions qui, je le conçois, doivent faire partie des « recettes » originales, mais m’ont conduite à prendre un mois à finir ce satané bouquin ! – en y intercalant d’autres lectures plus trépidantes. Je crois que le pire ça a été Tristan and Isolt, parce que c’était le texte le plus long avec ses 140 pages, et pourtant je l’avais déjà lu en version plus courte et adoré. J’ai aussi eu beaucoup de mal avec les vers rythmant les parties narratives dans Aucassin et Nicolette, qu’en fait je n’ai pas vraiment aimé tout court surtout à cause du type de narration. (Oui en fait le fond ça allait mais la forme ne m’allait pas du tout !) J’ai aussi été assez déçue du Book of Balin que j’ai découvert ici, dont l’intrigue m’a même perdue quelques fois. Dommage car il fait partie de la saga La Morte Darthur, par Sir Thomas Malory, qui est un classique de ce type de littérature et que j’avais assez envie de lire un jour, jusque là. Je pensais y trouver peut-être des sources tolkieniennes, dont le nom qui ne pouvait pas ne pas me faire penser à Bilbo le Hobbit, mais en fait je n’ai tellement pas accroché au texte que je n’ai rien noté du tout sans savoir si je ratais quelque chose ou non. Disons que j’ai désormais une grosse idée de l’histoire si jamais je lis quelque chose dessus ailleurs… –‘
Cependant je suis assez contente de m’être enfilé ce pavé pas toujours évident à digérer, j’ai apprécié découvrir les courts Havelok the Dane et Sir Orfeo (30 et 10 p.), dont les styles narratifs et les développements m’ont beaucoup plu, et mes relectures de Sir Gawain and the Green Knight (65 p.)et de Perceval (80 p.) ont été très plaisantes. Si Perceval le bourrin me fait toujours rire avec ses manières de rustre pas éduqué pour un sou et ses interprétations qui partent en sucette et lui valent bien des mésaventures (excellente interprétation du personnage dans la série Kaamelott d’Alexandre Astier) j’aime également l’aspect plus sage et plus classique des aventures de Gauvain (en fr.), modèle de droiture et de chevalerie, qui trouve un challenge plus fort que lui.
Grim was a wise fisherman, and with net and hook he caught many a good fish : sturgeon, whale, turbot, salmon, seal, and eels; also cod and porpoise, herring, mackerel, flounder, plaice and skate. ~ Havelock the Dane
[« Grim était un vétéran pêcheur, et avec filet et hameçon il attrapa plus d’un poisson : esturgeon, baleine, turbot, saumon, phoque, et anguilles; également morue et marsouin, hareng, maquereau, flet, carrelet et raie. »]
Les deux co-éditeurs de l’anthologie ont fait du super travail en ce qui concerne l’introduction générale et les introductions à chaque texte : ils replacent le contexte, redéfinissent les sources connues et supposées, donnent un motif à un tel rassemblement de textes, avec beaucoup de précision et un peu d’humour. Je retiens notamment que le Graal pourrait être un plat à poisson. J’ai aussi noté énormément de références à des liens (possibles ou certifiés) de ces textes avec les cultures celtes, françaises, nordiques et autres de l’époque.
Un recueil de textes à visée d’étude, pas toujours évident à suivre pour le lecteur du XXIe siècle, mais qui je pense peut être une source à conseiller aux amateurs de cette littérature, dans un cadre universitaire ou par simple attrait personnel, que ce soit pour la diversité mais aussi l’universalité de ces textes, ou bien pour le très bon travail de présentation.
Lu dans le cadre du CRAAA