Le Vent se lève

De Hayao Miyazaki. 2014. Film d’animation. Grosse claque. [2h06]
Titre original : Kaze tachinu, 2013
leventseleveRésumé : « Dans les années 1920, le jeune Jiro Horikoshi, fasciné par le ciel et le vent, rêve de devenir pilote d’avion. Mais sa mauvaise vue l’en empêche. Il se fait alors embaucher dans une entreprise d’aéronautique : puisqu’il ne peut pas piloter, il dessinera le plus bel avion du monde…« 
Je sors tout juste de la séance – il était temps, je pense, car les horaires VO se réduisent de semaine en semaine, et je bosse (et je veux aller aux séances de 14h parce que c’est moins cher :p).
J’en suis encore positivement traumatisée. Je suis sortie du ciné avec cette étrange impression, que je vous souhaite avoir déjà expérimentée, que le monde réel n’est pas plus réel que celui dans lequel vous venez de vivre vos 10 dernières années 2 dernières heures – moins beau, moins fluide, un peu plus terne, moins éblouissant et étrangement familier.

Au vu du résumé, je ne m’attendais pas à quelque chose de trépidant, ni à l’irruption d’un dragon ou autre animal fabuleux (cherchez pas, y’a rien de tout ça ! 😉), mais j’attendais avec toujours autant d’impatience cette qualité artistique exceptionnelle, ce sens du détail, ces mouvements si fluides et si semblables au réel, cette impression globale enfin d’admirer une série de peintures mouvantes aux couleurs magnifiques. De ce côté-là, je n’ai eu absolument aucune déception, regrettant presque même de temps en temps que les personnages reprennent le cours de l’action.
leventselevejpConcernant le synopsis, le contenu du film, j’ai été agréablement surprise de ne pas m’ennuyer du tout (l’aéronautique, voyez-vous, ce n’est pas franchement mon rayon), de suivre les commentaires en gros (je n’ai pas compris un ou deux détails techniques, mais ce n’est pas grave), et même de trouver bien d’autres choses que l’aéronautique. Toujours fidèle à lui-même, Miyazaki nous propose encore une fois des histoires secondaires de famille, d’amis, de rencontres, d' »aventures », plus semblables à celle d’Arrietty que de Princesse Mononoké ou le Voyage de Chihiro ici, qui enrobent habilement le fil conducteur principal. De ce fait, il n’est pas du tout nécessaire d’être féru de techniques pour simplement apprécier ce film.
Cependant je suis restée en admiration devant les séquences de vol tout simplement parce que c’était superbe à voir, et aussi que les personnages permettaient de faire passer beaucoup d’émotion dans ces moments-là, parce que c’était important pour eux. J’ai également eu plein d’émotions que je qualifierais de « bizarres » voire de « gênantes » (mais néanmoins très enrichissantes) – le film nous emmène dans le Japon des années 30 : le pays est en guerre contre la Chine, et dans le reste du monde les grandes puissances se lancent dans une course à l’armement. Nous avons donc une vision des prémices de la Seconde Guerre Mondiale du côté des forces de l’Axe, du côté « civil », mais aussi militaire, car, en tant qu’ingénieur aéronautique, Jiro se retrouve justement pris entre deux feux, entre deux envies : construire de beaux avions, de véritables prouesses technologiques / les voir voler, et non pas partir pour ne jamais revenir (le côté civil et le côté militaire, quoi). J’aurais pensé que la guerre serait plus largement évoquée, mais justement, non, cela reste un concept distant, un obstacle quelquefois pour les objectifs de Jiro, mais qui ne vient le déranger véritablement que dans ses rêves, dans une grande partie du film. Finalement, il est recruté en Allemagne, et à cet instant je me suis dit que de voir le film en VO c’était cool mais qu’on avait le droit aux sous-titres que pour le japonais –‘. Heureusement les situations font qu’on arrive à imaginer ce qui se dit en allemand !
Bon, alors vous allez me dire, ne pas parler de la guerre, c’est pas forcément bouleversant. Non, ce qu’il l’est, c’est de suivre la vie de ce jeune homme passionné, fasciné par la courbe d’une aile ou une technique de pointe de rivetage, qui fabrique des avions en papier et y joue avec sa bien-aimée, et va finir par fabriquer un avion tellement révolutionnaire que sa ligne nous est désormais à tous bien trop familière, et évoque des images beaucoup moins douces que les ondées nippones ou le vent fort et facétieux de la campagne de Tokyo. En fait, après avoir vu ce film, je vais certainement y repenser la prochaine fois que je vais retomber sur des images de la guerre dans le Pacifique, replacer le visage – animé – de Jiro Horikoshi auprès de sa création.
Ce qui est incroyable c’est la manière dont le réalisateur nous amène à considérer ce qui va être utilisé par la suite comme engin de mort comme un objet avant tout magnifique, à la fois révolutionnaire dans sa technologie, et très esthétique – parce que malgré tout son concepteur a mis tout son être, des années de travail, et une implication émotionnelle énorme dans cet avion – c’est son chef d’œuvre, tout simplement.

LeVentSeLeveHayaoMiyazaki

Les rêves du héros m’ont fait penser en même temps au Château dans le ciel ou à Nausicaa de la vallée du vent (machines volantes), et au Château ambulant (scènes de guerre / de destruction). Les aspects familiaux / moments du quotidien sont plus proches de ce qu’on trouve chez Totoro ou Arrietty (qui n’est pas un Miyazaki), ou encore le Tombeau des lucioles (mais quand même pas triste à ce point, rassurez-vous !!).
Je suis restée baba devant les paysages japonais. Se dire que pour une fois, c’est du réel, pas un monde imaginaire, c’est juste… vraiment très très beau (et très très vert), et cela reflète une sérénité tranquille très attrayante. 🙂 Par conséquent quelques scènes sont d’autant plus difficiles à voir, comme (micro-spoil) celles du tremblement de terre au début. C’est un film que je conseillerais à tout ceux qui ont envie de découvrir l’intérieur des maisons japonaises, certains systèmes ou mœurs des années 1920-1930 – d’après mes maigres connaissances, et comptant sur le fait que la production est entièrement japonaise, j’imagine que ça colle à tous les niveaux ou presque ! 🙂 On voit beaucoup de scènes rappelant la situation économique et sociale catastrophique du Japon de l’époque, énormément de détails et de scénettes qui posent l’ambiance et l’environnement. En tous cas c’est extrêmement dépaysant et m’a permis une immersion plus complète que je ne l’aurais imaginé.
Autant d’arguments pour noter que non, le dernier Miyazaki n’est pas du tout, aucunement, comparable à Ponyo sur la falaise (d’aucuns s’y sont essayés !), et pas forcément à aller voir avec de très jeunes enfants, qui risquent probablement de trouver tout ça bien long et pas très drôle ni très mignon. Toutefois c’est un film magnifique, au rythme un peu lent, certes, mais avec beaucoup de qualités.
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6 réflexions au sujet de « Le Vent se lève »

  1. J’approuve tout ce que tu dis dans cet article. Le film m’a bouleversé par bien des choses – même si j’ai débarqué sans trop savoir quand ça se passait et que ça m’a fortement perturbée jusqu’à ce que je comprenne qu’on était dans les années 30 – et j’ai eu ce sentiment en en sortant, d’être sur un nuage. J’ai beaucoup aimé la scène où il fait voler des avions en papier pour amuser la femme dont il est amoureux… Bref, c’était magnifique ! (d’ailleurs, je n’ai toujours pas écrit d’article dessus, il faut que je m’y mette -_-« )

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